mardi 13 septembre 2011

Dans la république bananière appelée France, les révélations de Robert Bourgi font « pschiiiit ! »

L’affaire est connue de tous, des chefs d’Etats du pré-carré africain de la France financent les campagnes électorales des chefs d’Etats Français et d’autres politiques en vue. C’est l’une des pratiques des relations tordues que la France, telle une mère qui vit difficilement l’indépendance de ses fils - et s’ingère dans leurs affaires les plus intimes -, entretien avec ses anciennes possessions d’Afrique. Quoi qu’indépendantes, elle s’arrange, grâce à des réseaux opaques ou transparents, à s’y maintenir chez elle. Plus que les populations de ces pays, elle y est souveraine : la France fait et défait les chefs d’Etats Africains. Alors pour être bien vus et protégés de cette mère étrange et puissante, les chefs d’Etats de ces pays lui font des faveurs qu’ils ne font jamais aux leurs. Ils offrent aux chefs d’Etats Français de somptueux moyens de battre campagne. C’est ce secret qui n’en est pas un qu’a révélé Me Robert Bourgi, un important membre du dispositif de la Françafrique dimanche 11 septembre au Journal Du Dimanche en citant deux noms, celui de l’ancien Président de la République et celui de celui qui fut son Secrétaire Général puis son Premier Ministre. Evidemment si ça n’a fait encore pas « fait pschiiit » (entendez si l'affaire ne s'est pas encore volatilisée pour disparaître des médias et ne jamais faire l'objet d'une enquête judiciaire) ça le fera un jour ! Surtout en ces temps de République bananière.

Oui la France est une république bananière. Si personne ne s’en offusque c’est que ce pays qui compte des milliers d’intellectuels forts en gueule au mètre carré a perdu de sa capacité à s’indigner. Combien d’injustices sont passées sous silence, combien d’entorses à la démocratie et à la sainte séparation des pouvoirs dont on s’accommode allégrement ? Que ne gueulent-ils pas lorsque les valeurs de la République pourtant évoquées avec piété moniale devant les médias et devant les foules sont impunément moquées ? Est-ce parce que les victimes de ces immoralités sont essentiellement des nègres ? Que n’ont-ils le courage de constater que le pays de Benjamin Constant, de Victor Hugo, de Lamartine et du Zola de l’affaire Dreyfus est devenu une véritable république bananière ? Parce que république bananière c’est bien quand il s’agit de républiques tropicales. Mais moquer une partie de l’humanité parce qu’un peu grossière, gauche et mal-élevée, c’est oublier que l’universel ne concerne pas que ce qu’il y a de reluisant dans l’humanité et que si on ne s'attèle pas à maintenir ardente la flamme des nobles idéaux, on régresse peu à peu pour ne tendre qu'aux choses prosaïques. Le laid et le répugnant appartiennent eux-aussi à tous les hommes, on ne les trouve pas que chez les horribles dictateurs d'Afrique, et, il y a encore peu, d'Amérique latine. Autrement pouvait-on imaginer qu’un brillant économiste, dirigeant d'une institution internationale de premier planan et futur candidat à une prestigieuse élection cède si facilement, - ivre de la supériorité que lui conférait sa position sans doute – aux charmes pas si fameux d’une gueuse au point de finir éclaboussé par une accusation sordide ? Qu'un journaliste de l’un des titres phares de la presse se fasse espionner par les services de l’Etat au mépris de la liberté de la presse, ne provoque pas le tôlé qu'il devrait en principe créer est effrayant. Lorsque l’action de la justice, et c’est une honte, est constamment entravée par l’exécutif lorsque des « grands sont en cause », la Révolution de 1789 perd toute sa signification. Où est-on ? Pas dans la Tunisie de Ben Ali, mais en France.

Cunctator.

samedi 10 septembre 2011

Le défaut d'hommes de conviction et de discernement vouait d'avance les révolutions africaines à l'échec

Le recul permet aujourd'hui d'identifier les failles majeures des révolutions de l'Afrique subsaharienne post-indépendance. Aucune n'a tenu ses promesses. Les causes de l'échec sont pour l'essentiel d'ordre anthropologique. Au vu de la qualité douteuse des hommes qui tentèrent l'aventure, il était prévisible que les choses n'iraient pas loin; que même là où l'expérience fut tentée, le passage de ces hommes induirait une crise sociale sans précédant et longue. Du marxisme et du socialisme en effet, il n'est resté aujourd'hui que les dessous pervers de l'utopie qui constituent pour la conscience et l'action politique africaines un lourd handicap. Quelle que soit l'idéologie qui l'inspire, passée l'orage de l'émotion des commencements, une révolution, c'est toujours le contraire du bricolage. Et lorsqu'au bricolage s'ajoutent la faiblesse de l'engagement et des convictions, le mépris de l'homme dissimulé sous l'esthétique du bagout, ça fait des ravages. Placée dans les mains d'hommes assez candides pour croire qu'il existe des recettes toutes faites pour apporter aux peuples le bonheur auquel ils aspirent, le marxisme et le socialisme ont fait de ces zélotes les joyeux fossoyeurs de leurs propres pays. C'est que nos révolutionnaires était mal préparés à relever le terrible destin de leurs pays: l'appel à la redéfinition et à la construction des sociétés dans le respect des grandes valeurs qui n'en font pas des absurdités baroques inacceptables. Alors ils ont fini par détruire l'Afrique mieux que l'avait fait la colonisation. Instruits, ou analphabètes brûlants d'ardeur pour une idéologie donnée pour être une panacée qui, juste par une parole rituelle, viendrait, illico, transformer la société, sans être tous des gredins, ils sont tous d'origine obscure: bidonville colonial, bourgade de l'intérieur du pays vulgairement appelée village, royaumes, tous ces milieux de la pensée confuse et des petites sagesses terre à terre, qui n'enseignent pas à regarder au delà de la limite du village ou du territoire du groupe d'appartenance. Univers clos et cloisonné dont cependant, ils font le centre du monde.


Ces entraves de leurs origines spirituellement et intellectuellement médiocres poursuivront jusqu'au bout nos révolutionnaires. L'ouverture - de mauvaise grace - à la démocratie ne les transforme pas d'un bloc comme sous l'effet d'une baguette magique. Ils avaient trop pris goût à la révolution, source de tant d'avantages de toutes natures, pour, d'un coeur sincère, opérer le retournement douloureux qu'exigeait le passage à un régime politique aux vertus et aux pratiques tellement contraires à celles d'une révolution de leur façon. On trouverait difficilement un seul dirigeant révolutionnaire dont l'intelligence et la sensibilité (le peu dont ils pouvaient être doués) aient été mises au service de la recherche du bonheur collectif. On peut alors se demander si les trois décennies que dura le régime marxiste dans cette partie du monde, plus que la longue et la tragique traite des Noirs et le colonialisme, n'ont pas contribué à l'abrutissement et au pourissement de la psyché collective africaine noire. La conduite agressive et dévoyée de ces dirigeants soucieux avant tout de prendre leur revanche sur leur misère d'hier, ne pouvait fabriquer le climat sain nécessaire au maintien des équilibres psychologiques ébranlés par un siècle de colonialisme féroce. La sauvegarde de positions sociales élevées, acquises par la brigue, l'intrigue, la ruse ou la violence, les préoccupât avant la recherche sincère de solutions susceptibles de sortir leurs peuples de la misère. Ces hommes qui, par une sorte de respect superstitieux des préceptes marxistes, s'efforceait de ne craindre ni dieu ni diable, et qui, sauf lorsqu'il s'agissait de leurs proches par le sang ou par le coeur, ne s'embarrassaient pas de scrupules pour arrondir des avantages personnels, ces hommes allaient au bout d'une génération, transformer leurs pays en immenses champs de ruine. Sur le plan des moeurs et de la moralité, les résultats du combat révolutionnaire ne se firent pas attendre. Dans la nouvelle société, dont, avec une ardeur inimitable ces imprudents jettaient les bases, les moeurs progressivement s'effritèrent par pans entiers. Les principes et les valeurs qui malgré la tragédie de la traite des Noirs et la violence coloniale, continuaient d'assurer un relatif équilibre social cédèrent un à un.

Redéfinies conformément aux principes de l'idéologie marxiste dominante, les sociétés africaines qui tiraient fierté et orgueil d'y avoir adhéré furent précipitées dans un horrible crépuscule de leurs valeurs de culture. Des valeurs sacralisées par une tradition millénaire furent brutalement soufflées, moquées comme absurdes et incompatibles avec le marxisme, puis finalement retournées contre elles-mêmes. Sur le désordre révolutionnaire qui a fait le lit à un étrange humanisme bien étranger à la culture africaine, une démocratie de principe est certes venue se surimposer. Ces convulsions témoignent de la profondeur de la crise sociale et des valeurs subséquente au passage de l'idéologie marxiste endossée comme prêt-à porter. Mais en même temps, ces convulsions de la démocratie africaine sont la preuve que, pas plus qu'elles n'étaient prêtes pour le marxisme, les sociétés africaines ne le sont pour un régime politique dont, à côté de bien des choses bonnes, excellentes même, nombre de principes de fonctionnement sont loin de leur système de représentation du monde et de leurs pratiques. Cela signifie qu'avant d'adopter le marxisme ou la démocratie comme forme de gestion sociale, les Africains devraient passer par une phase transitoire d'inititaion progressive et prudente. Le temps d'enraciner des convictions. Par la persuation et non par la férule, fût-elle simplement verbale. Faute de quoi, détruites et recomposées sur un modèle étranger, les sociétés africaines risquent de ne pas retrouver sur ce modèle étranger le nouvel équilibre qu'elles recherchent. Coincées et écartelées qu'elles seraient entre deux pôles de sollicitations contradictoires. Position intenable qui produit des monstres.

Par Dominique Ngoïe Ngalla et Philippe Cunctator qui nous livrent leurs réflexions sur le monde d'aujourd'hui : de l'Afrique clopinant sur le chemin de la modernité au reste du monde, de la complexité des enjeux politiques aux péripéties du fait religieux, nous découvrons sous la plume de Dominique l'âme du poète qui rêve d'un autre monde, mais n'oublie ni les brûlures de l'histoire ni la dure réalité du temps présent...

Quelques ouvrages de Dominique Ngoïe-Ngalla...





L'Evangile au coeur de l'Afrique des ethnies dans le temps court
; l'obstacle CU, Ed. Publibook, 2007 .




Route de nuit, roman. Ed. Publibook, 2006.




Aux confins du Ntotila, entre mythe, mémoire et histoire ; bakaa, Ed. Bajag-Méri, 2006.




Quel état pour l'Afrique, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Lettre d'un pygmée à un bantu, mise en scène en 1989 par Pierrette Dupoyet au Festival d'Avignon. IPN 1988, Ed. Bajag-Méri, 2003.




Combat pour une renaissance de l'Afrique nègre, Parole de Vivant Ed. Espaces Culturels, Paris, 2002.




Le retour des ethnies. La violence identitaire. Imp. Multiprint, Abidjan, 1999.




L'ombre de la nuit et Lettre à ma grand-mère, nouvelles, ATIMCO Combourg, 1994.




La geste de Ngoma, Mbima, 1982.




Lettre à un étudiant africain, Mbonda, 1980.




Nouveaux poèmes rustiques, Saint-Paul, 1979.




Nocturne, poésie, Saint-Paul, 1977.




Mandouanes, poésie, Saint-Paul, 1976.




L'enfance de Mpassi, récit, Atimco, 1972.




Poèmes rustiques, Atimco, 1971.